mardi 27 décembre 2011

Changement (partiel) du statut comptable d’un élément d’actif non courant : immobilisation corporelle (IAS16) vers immeuble de placement (IAS40)



Prière de citer la référence (notre blog et l’auteur) avant de reproduire ce cas pratique

La Vinci est une société anonyme tunisienne qui prépare et publie ses états financiers conformément au référentiel comptable international. Elle est soumise à l’impôt sur les sociétés (taux = 30%).
Le 31/01/2007, la société Vinci a achevé la construction d’un immeuble qu’elle a nommé « la Joconde ». A cette date, le compte 23 « construction en cours » est doté d’un solde débiteur de 150 000 dinars. Cet immeuble est constitué d’un rez-de-chaussée et de 4 étages et sa durée d’utilité est estimée à 50 ans. Le 31/03/2007, la société Vinci a commencé l’exploitation de l’immeuble en question.
Le 1/06/2008, La société Vinci a décidé de ne garder que le rez-de-chaussée pour ses besoins d’exploitation. En effet, elle a décidé de louer les 4 étages à une société de télécommunication. Un document tiré de la comptabilité analytique qui revient à la date du 31/01/2007, montre que le coût de construction du rez-de-chaussée constitue le 1/5ème du coût total de l’immeuble. Au 1/06/2008, selon l’avis d’un expert immobilier chevronné, la valeur marchande des quatre étages peut être estimée à 200 000 dinars. Au 31/12/2008, la juste valeur des quatre étages de l’immeuble la Joconde est estimée à 220 000 dinars. Le 05/05/2009, la société Vinci a vendu ces quatre étages à leur juste valeur, c'est-à-dire à 230 000 dinars.
Travail à faire :
En se basant sur les informations présentées ci-haut,
1. Analyser le statut comptable de l’immeuble la Joconde au 31/01/2007 et au 01/06/2008.
2. Passer les écritures comptables nécessaires relatives à l’immeuble la Joconde durant les dates suivantes :
a. le 31/01/2007 ;
b. le 31/12/2007 ;
c. le 01/06/2008 ;
d. le 31/12/2008 ; et
e. le 05/05/2009.
NB : Argumenter toutes les écritures comptables que vous avez passé.

Analyse et discussion du cas:

1). Analyse du statut comptable de l’immeuble la Joconde :

Au 31/01/2007 : A cette date, l’intention de l’entreprise qui se trouve derrière la destination de l’immeuble la Joconde est l’exploitation. Il s’agit donc d’une construction (immobilisation corporelle ; traitée comptablement selon la norme IAS 16).

Au 01/06/2008 : A cette date l’intention de l’entreprise a changé. Elle veut occuper toujours le rez-de-chaussée pour ses besoins d’exploitation. La valeur d’origine de ce RDC est de 150000/5 : soit 30000 dinars. Ce RDC garde toujours son statut de construction (compte 222). Les 4 étages seront loués ; donc ils ne seront plus occupés par le propriétaire. Puisque leur valeur peut être estimée d’une manière fiable et visiblement ils peuvent être vendus d’une manière séparable par rapport au reste de l’immeuble (RDC), on peut les considérer comme un immeuble de placement (IAS 40). Sa valeur comptable à cette date est de 150000x (4/5) : soit 120000 dinars.

2). Ecritures comptables :

lundi 19 décembre 2011

impôt différé et divergence entre amortissement comptable et amortissement fiscal



prière de citer la référence (notre blog et l'auteur) avant de reproduire ce cas pratique.

L’entreprise Salina, spécialisée dans la production du sel marin, achète le 01/01/2008 une nouvelle machine dont le coût d’entrée dans le bilan est de 200 000 dinars. Le chef comptable de la société décide d’appliquer la méthode d’amortissement dégressif. Cette méthode d’amortissement n’est pas reconnue par la législation fiscale tunisienne. Cette dernière ne reconnaît que la méthode d’amortissement linéaire. Sachant que l’entreprise Salina applique les normes comptables internationales et que la durée de vie économique de la machine en question est de 5 ans, nous vous demandons :
1. D’argumenter le choix du chef comptable en matière de méthode d’amortissement,
2. De passer les écritures comptables relatives aux dotations d’amortissement et les écritures d’impôt différé y relatives et ce jusqu’à l’amortissement intégrale de la machine.
3. Dresser le grand livre du compte de l’impôt différé que vous avez utilisé dans vos écritures comptables. Analyser le sens du solde dégagé à l’achèvement de l’amortissement de la machine.
NB : Taux d’impôt sur le bénéfice : 30%.
NB2 : l’entreprise Salina applique la plan des comptes tunisien pour passer ses écritures comptables.

Corrigé:

Première question : le chef comptable a tout à fait raison de considérer la méthode d’amortissement dégressif malgré le fait qu’elle ne soit pas reconnue fiscalement. En effet, le comptable :
1. N’est pas tenu d’observer la réglementation fiscale, par contre il est tenu d’appliquer la normalisation comptable (et c’est pour cette raison qu’il y a une différence entre le résultat comptable et le résultat fiscal) pour pouvoir atteindre les caractéristiques qualitatives de l’information comptable et financière.
2. L’utilisation de la méthode d’amortissement dégressif répond mieux au principe de la « substance over form » (ou prééminence du fond économique sur la forme juridique).

Question 2 : comptabilisation
Tableau d’amortissement de la machine :
Taux d’amortissement dégressif : 1/5 x 2,5 = 50%.


Différence temporaire: (approche bilantielle) : valeur comptable, base fiscale:



Question 3 : grand livre


Commentaire : l’impôt différé (dans notre cas impôt différé actif) se crée pour ajuster le compte 69 impôt sur le bénéfice pour qu’il reflète une imposition sur un bénéfice calculé sur la base d’une normalisation comptable (prééminence du fond sur la forme). Cette création (cumul) à tendance à s’inverser pour combler la différence temporraire (origine de l’impôt différé). C’est pour cette raison qu’avec l’achèvement du plan de l’amortissement, le solde du compte 4349 sera nul.

jeudi 15 décembre 2011

USTO: Le nouveau système comptable et financier fait débat



Le Quotidien d'Oran : 11 - 12 - 2011
La problématique du passage du plan comptable national, au nouveau système comptable et financier, a été au centre des débats d'un colloque tenu hier à l'auditorium de l'USTO, sur initiative de l'Ecole préparatoire des Sciences économiques, commerciales et de gestion, de l'université d'Oran. Destinée aussi bien à l'institution académique qu'aux entreprises, la rencontre s'est déroulée en présence d'opérateurs économiques. La Sonatrach et la SEOR, entre autres, ont marqué leur présence, en communiquant leurs expériences respectives après près de deux années d'application. Pourtant, le passage à ce nouveau système est devenu impératif, en raison d'une part de tous les changements opérés à l'issue des réformes structurelles survenues et d'autre part pour se normaliser et aspirer à l'adhésion à l'OMC, étant donné que le système en question constitue un outil de choix pour optimiser les actifs des entreprises et aussi répercuter la meilleure information permettant une meilleure transparence dans la gestion comptable.



Au programme, les organisateurs ont prévu des communications d'universitaires, de représentants d'entreprises ainsi que des intervenants étrangers venus étaler les expériences de leurs pays, comme c'est le cas de la Tunisie et de l'Espagne. Deux objectifs ont été assignés à ce colloque à savoir des éclairages de différents acteurs aussi bien universitaires que managers, administrateurs et autres cadres financiers et l'élargissement des pistes de réflexion autour de l'ensemble des aspects de ce système. Le président de la chambre nationale des commissaires aux comptes, Cherif Bourenane, est revenu sur la transition du passage de l'ancien PCN, calqué sur le modèle français, et le SCF plus universel et s'inscrivant dans une logique de mondialisation. L'orateur s'est attelé à énumérer toute la législation qui a précédé la loi portant ce nouveau système qui devait prendre effet, en janvier 2009 et qui a été retardé d'une année afin de permettre aux différents acteurs de réunir les conditions. De son côté, Mohamed Faker Klibi, de l'Ecole supérieure des Sciences économiques et commerciales de Tunis, est intervenu sur le système comptable des entreprises tunisiennes et son bilan après 15 ans d'application. L'autre communication qui a été également suivie avec grand intérêt, avait trait aux retombées de ce passage sur la profession de comptable. L'auteur, El Bachir Mohamed Benmansour, expert comptable et membre du conseil de l'Ordre, a mis en évidence la question du changement de langage, la refonte des outils comptables ainsi que la nature de l'information comptable. Approché en marge de la rencontre, Salah Eddine Arif, enseignant chercheur en Sciences financières, à l'université d'Evry, et chargé de mission dans les pays du Maghreb, a déploré la faible présence des entreprises et a estimé qu'un travail important de vulgarisation de ce système reste à entreprendre, afin d'impliquer l'ensemble des acteurs, une condition pour sa réussite.

jeudi 3 novembre 2011

je vous souhaite une bonne année universitaire 2011 - 2012




Bonjour,
Nous accueillons une nouvelle année universitaire; j'espère qu'elle vous apportera (collègues et étudiants) bonheur, santé et réussite. En ce qui me concerne, j'enseigne toujours la comptabilité internationale: IAS/IFRS (un premier niveau pour les 3ièmes années licence appliquée et fondamentale et un deuxième niveau (plus approfondi) pour les premières années mastère professionnel : comptabilité, contrôle et audit). Enseigner les normes internationales dans un pays en développement est toujours délicat. Cette délicatesse devient plus accrue dans un pays doté d'une culture francophone. Les normes internationales sont élaborées suivant une approche basée sur les principes comptables (principles based approach Vs rules based approach - une approche recommandée par le FASB américain et le ICAEW britannique). Dans ce cadre, l'effort que j'essayerai de fournir pour mieux faire saisir l'âme des normes internationales à mes étudiants est de les pousser à apprendre à construire un jugement professionnel à partir de la (1) compréhension des besoins des lecteurs des états financiers (acteurs des marchés de capitaux principalement (mettez - vous à ma place: j'enseigne dans un pays où le marché de capitaux est presque inactif :)), (2) des caractéristiques qualitatives des informations financières et (3) des principes comptables. Ces trois considérations constituent mes fidèles repères lors de l’explication de la portée technique et pratique d’une norme internationale donnée. A côté des IAS/IFRS, j’ai commencé cette année l’enseignement d’un nouveau module que j’ai proposé à l’administration de l’Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales de Tunis : Le marché du travail des professionnels comptables. Enseigner le marché du travail (ouvert et caché) aux étudiants est une pratique courante dans les pays anglo-saxons. Ce cours de « marché du travail des professionnels comptables » est basé sur un enseignement – coaching et a pour objet de pousser vers un apprentissage comportementale et non pas vers un apprentissage théorique ou conceptuel. Sa devise est : s’il est intelligent d’apprendre de son expérience, il est encore plus intelligent d’apprendre de l’expérience des autres (sagesse chinoise). Son objectif est le suivant : Donner aux étudiants les moyens pour leur faciliter la lisibilité du marché du travail des professionnels comptables et de gérer – eux même – leur carrière. Plus précisément, il met l’accent sur les sous – objectifs suivants :
• Faciliter et améliorer la lisibilité du marché du travail des professionnels comptables : ou se trouvent les opportunités de travail (à l’échelle nationale et internationale), anticiper les tendances (en terme d’offre et de demande) du marché de travail, valoriser ses talents et compétences dans un laps de temps bien défini pour pourvoir un poste donné…etc.
• mettre l’accent sur les techniques de recherche d’un emploi dans le domaine de la comptabilité (dresser un bilan de compétence, rédiger un CV convainquant, réussir un entretien, réussir la période d’intégration…en deux mots: comment battre le marché du travail).
• gérer une carrière (horizontale et/ou latérale) d’un professionnel de la comptabilité.
J’espère pouvoir atteindre tous ces objectifs…à bientôt.

jeudi 22 septembre 2011

mes réponses à des questions intéressantes



Ci-dessous, je publie mes réponses (envoyées par email) à une étudiante ivoirienne qui fait des études dans un établissement universitaire marocain.

1. Quels sont, selon vous, les avantages à tirer de l’adoption des IFRS pour les pays d’Afrique ?

Les normes internationales d’information financières (IFRS) font partie du référentiel international (cadre de préparation et de présentation des informations financières + IAS et leurs interprétations et les interprétations liées aux IFRS dites IFRIC) élaboré par l’IASB. Ce sont des normes de haute qualité capables de mettre beaucoup de lumières sur l’activité des entreprises qui ont accepté d’évoluer dans un cadre mondialisé (incertitude et recours plus ou moins intensif aux instruments financiers…). Les pays d’Afrique pourraient tirer profit suite à l’utilisation de ces normes s’ils arrivent à favoriser l’existence d’un certains nombres de préalables qui sont le propre des pays occidentaux : un état de démocratie, une bonne gouvernance, une classe moyenne disposant d’un pouvoir d’achat satisfaisant, un enseignement de qualité…etc.

2. Quels sont les inconvénients qui y sont associés ?

Dans un pays donné et sur un plan macroéconomique, la comptabilité est appelée à jouer un rôle primordiale : donner des indicateurs fiables renseignant sur la manière avec laquelle les entreprises « négocient » avec leur environnement économique. Ces indicateurs permettraient de distinguer les entreprises performantes des entreprises « gaspilleuses » de ressources – financières -. Par conséquent, Il faut que les opérations liées aux financements apportés aux entreprises (économiquement parlant, ces dernières sont appelées des agents à besoins de financement) par les bailleurs de fonds (des agents à capacité de financement) soient faites dans un cadre transparent. En deux mots, la comptabilité essaye de protéger ceux qui financent l’économie. Cependant, la comptabilité ne pourrait jouer ce rôle que lorsque les préalables dont on a cités ci – haut forment une réalité ancrée dans la culture des techniciens de la comptabilité (préparateurs des états financiers et auditeurs) et des différents utilisateurs de l’information financière. Ce sont autant de défis que les pays désireux d’adopter les IFRS devraient observer.

3. Quels sont les principaux défis à relever pour ces pays ?

Il faut tout simplement mettre l’accent sur la formation des comptables et les libérer du joug des dirigeants des entreprises. Le comptable n’est pas un compteur d’haricots (c’est ce que je dis toujours), c’est un fournisseur de confiance.

4. L’Afrique, si elle entame ce processus de convergence vers les IFRS, serait-elle gagnante ?

Je suis optimiste. Les africains méritent un meilleur bien être car leur pays respectifs regorgent de talents et de ressources…mais aussi et malheureusement de beaucoup de corruption. Pour juguler la corruption il y a, à mon avis, une seule recette : la transparence. La transparence financière pourraient être une conséquence logique d’une bonne application des IFRS par des comptables qualifiés.

vendredi 10 juin 2011

L’IASB contribuerait – il au développement comptable des pays en développement ?



par Mohamed Faker KLIBI - Docteur ès sciences comptables (Université de Tunis)
Les pays en développement doivent faire mieux pour améliorer le bien être de leurs citoyens. Pour qu’il y ait bien-être, il faudrait qu’il y ait création de richesses (économique, culturelle, sociale…) tout d’abord, et partage équitable par la suite. Le bien-être économique touche les besoins les plus vitaux, mais aussi, grâce à sa « disponibilité » les autres formes de bien-être pourraient être accessibles. C’est la justice sociale qui doit « coller » à un développement économique qui nous permettrait de mériter ce satisfecit. La création des richesses économiques se fait dans des boîtes noires qu’on appelle entreprises. Ces dernières ont- elles des comptes à rendre ? bien sûr, je dirais. Des comptes à rendre à toute une nation, car c’est cette dernière qui a délégué à ces entreprises la tâche de la création de richesse qui se fait à partir d’une terre qui lui appartient et dieu sait, combien ces pays ont souffert pour défendre et récupérer leurs terres. Cependant, le problème c’est que nous sommes devant une situation absurde : les citoyens des pays en développement ne demandent -souvent- pas de comptes et les entreprises se contentent de publier des miettes d’informations. A mon sens, il s’agit d’un manque de développement comptable qui doit impérativement accompagner tout développement économique. Le développement comptable est le moyen qui permettrait de mettre terre à terre des concepts peu actionnables ayant été définis dans des tours d’ivoire telles que : justice sociale, bonne gouvernance, meilleure allocation des ressources…Le développement comptable vise la transparence financière dont le principal atout demeure la bonne utilisation des normes (comptables bien sûr) par des professionnels comptables qualifiés. Ces dernières années, on parle de plus en plus des normes IFRS produites par l’IASB. Je pense que ce méga – normalisateur devrait réviser sa stratégie pour avoir l’adhésion volontaire des pays en développement. Explication…

L’IASB : l’inventeur des IFRS
L’IASB (International Accounting Standards Board) est un organisme, de droit privé, chargé de la normalisation comptable à l’échelle internationale. Il fut créé en 1973 par le concours de neuf pays industriellement et financièrement développés (à l’exception, peut être du Mexique). A cette date, les normes comptables internationales, dites IAS (International Accounting Standards), ne bénéficiaient pas de beaucoup de crédit et de notoriété et ce, malgré le soutien de l’OICV (l’Organisation Internationale des Commissions de Valeurs) qui les recommandait (sans succès significatif) aux pays membres. En effet, les IAS étaient considérées comme trop laxistes et manquaient de rigueur dans la mesure où elles offraient plusieurs options et méthodes comptables susceptibles de nuire à l’une des caractéristiques qualitatives prévues par le cadre conceptuel de l’IASB à savoir la comparabilité des informations comptables et financières. La réussite des IAS, mesurée par le nombre d’adoptions par des normalisateurs nationaux ou, autrement par le nombre de leurs followers (si on emprunte le jargon de twitter), était donc partielle et, ne pourrait, à mon avis, être envisagée en dehors des trois cadres suivants :
• Quelques entreprises de grande taille et ayant une envergure internationale appliquaient ces normes d’une manière individuelle et volontaire, c'est-à-dire sans que ladite application ne soit prévue par une loi nationale. Ces entreprises appartiennent généralement aux pays développés.
• Quelques pays en développement, comme le Zimbabwe, ont adopté les IAS d’une manière pure et simple (sans aucune modification susceptible de respecter les spécificités de leur tissu économique et social). Une pareille adoption se justifiait par le fait que ces pays n’ont pas les moyens financiers et humains pour s’investir dans l’élaboration et la mise en place des normes comptables locales. En outre, dans ces pays, les acteurs économiques ne sont pas capables de faire l’association entre une normalisation comptable bien assimilée et bien pratiquée d’une part et, le développement économique et financier d’autre part.
• Quelques pays en développement avaient adopté une stratégie de normalisation dite d’adaptation dans la mesure où ils avaient décidé de prendre le référentiel comptable international comme une source d’inspiration. C’est le cas par exemple de la Tunisie et de l’Algérie.
Le vrai succès de l’IASB devient une réalité après la décision des pays de l’Union Européenne d’adopter les normes comptables internationales et ce, par la mise en place du règlement CE 1725/2003 du 29 septembre 2003. En cette année, toutes les normes IAS ont été adoptées (de l’IAS1 à l’IAS 41) sauf celles qui traitent des instruments financiers, à savoir les IAS 32 et 39. L’application de ces normes devient obligatoire à partir de l’exercice comptable 2005. Cette aubaine, favorisée par le processus rompant de la mondialisation, a été aussitôt saisie par l’IASB. En effet, ce dernier a entrepris tout un chantier de réformes, déjà engagées depuis 2001, en proposant un nouveau produit appelé IFRS (International Financial Reporting Standards). La stratégie actuelle de l’IASB est donc, de produire des normes comptables, à caractère financier, de haute qualité qui favorisent la transparence financière, et pour les grandes entreprises (full IFRS) et, depuis 2009, pour les petites et moyennes entreprises (la norme IFRS pour PME). Les IFRS mettent plus l’accent sur le reporting financier des entreprises et leur application compte sur le jugement professionnel des comptables. Ce jugement doit être guidé par le respect des objectifs explicitement énoncés dans le cadre conceptuel de l’IASB : satisfaire des utilisateurs de l’information financière afin qu’ils puissent s’engager dans des décisions économiques (pour les bailleurs de fonds, clients, fournisseurs, Etat…) et sociétale (pour le grand public d’une manière générale : salariés, journalistes et groupes de pression appartenant à la société civile) adéquates.
Actuellement, plus qu’une centaine de pays a déjà adopté les IFRS. Plusieurs autres pays (même les Etats – Unis) ont déclaré leur intention d’adopter ces normes et ont déjà mis en place une feuille de route pour atteindre cet objectif. Avec ce succès, l’IASB devient un organisme comparable à la banque mondiale ou au FMI, non pas du point de vue activité bien sûr mais plutôt du point de vue taille, notoriété internationale et...capacité d’influence.
Et les pays en développement dans tout ça ?
Confrontée à l’inévitable mondialisation et ses gardes fous, la majorité des pays en développement, consciente de son échec en matière de choix de ses modèles de développement socio-économique…et politique, a opté pour l’ouverture sur l’économie internationale. Ceci, s’est traduit par l’acceptation des aides et de l’encadrement (technique et technologique) des pays développés et des organisations financières internationales. Ces derniers exigent un monde unique (de préférence libéral) et sans idéologies- extrêmes. Sur le plan comptable, le phénomène qu’on a observé ces dernières années, c’est que, de plus en plus, des pays en développement courent derrière l’adoption des normes de l’IASB. C’est la logique du ‘‘one size fits all’’. Cette adoption s’est faite sous la pression de la banque mondiale et du FMI et ce, à travers les rapports sur le respect des normes et des codes (tous ces rapports sont publiés dans le site de la banque mondiale http://www.worldbank.org/ifa/rosc.html).
Actuellement, je pense qu’il est très difficile qu’un pays en développement puisse adopter et appliquer convenablement les normes comptables internationales, conçues originellement pour les besoins des économies développées et pour être appliquées par des professionnels comptables très bien formés. Je rappelle que les normes internationales sont fondées sur des principes généraux et ne prévoient pas, comme par exemple leurs homologues américaines, des règles détaillées qui facilitent leur compréhension. D’autant plus, ces normes sont très volumineuses : le référentiel comptable de l’IASB comprend plus de 3000 pages !
En revanche, à mon avis, pour pouvoir appliquer avec rigueur les IFRS il faudrait, tout d’abord, s’investir dans les ressources humaines : former les comptables, soit un coût supplémentaire pour les entreprises qui ont bien d’autres chats à fouetter, mais aussi former les formateurs et d’une manière générale, il faut penser à instaurer une culture comptable qui vise le développement comptable ô combien nécessaire pour atteindre un développement économique. Ce que j’entends par développement comptable ? C’est l’adéquation entre les normes comptables adoptées et la pratique comptable en vigueur. Cette adéquation donne lieu à des informations financières de qualité pour répondre à une demande effective faite par un public se trouvant à l’extérieur de l’entreprise et qui a vraiment besoin d’un état de transparence. Dans nos pays, force est de constater que nos normalisateurs sont inactifs. Cet « inactivisme » prend place car on ne croit pas au vrai rôle de la comptabilité en matière de développement économique, lequel passe par la disponibilité d’une gouvernance d’entreprise efficace qui garantit un minimum de fiabilité et d’exactitude des comptes pour pouvoir analyser, commenter et influer positivement sur ledit développement.
Le développement comptable dans les pays en développement : Quel rôle pour l’IASB ?
Bien entendu, l’IASB n’est pas un ange de lumière. Plusieurs opposants l’accusent d’impérialisme et mettent en question son rôle consistant à entrainer les pays du monde dans une ère de capitalisme comptable. Ces contestations se font de plus en plus fréquentes surtout suite à la crise financière qui a frappé de plein fouet l’économie (financière puis réelle) internationale. En effet, les normes internationales se basent sur le principe de la juste valeur qui pousse les entreprises à évaluer leurs emplois et ressources en se référant aux fluctuations du marché (parfois agressives et sans raisons objectives et ce, en cas de crise de confiance ou de l’existence de spéculations exagérées). En deux mots, la juste valeur n’aime pas les spéculateurs peu rationnels qui peuvent créer des bulles spéculatives non représentatives de l’économie réelle. Ces bulles trouvent une place dans les états financiers si le comptable applique stricto sensu le principe de juste valeur. L’utilisation des IFRS est donc dangereuse si ces normes sont appliquées avec peu de compétence et de responsabilité. C’est pour cette raison que les pays en développement devraient être bien préparés pour une meilleure application des IFRS et l’IASB doit apporter son aide à ces pays.
Si nos pays courent derrière l’adoption des normes de l’IASB, ce dernier court – il derrière la bonne application de ces normes ? Je dirais non. L’organisme de la normalisation internationale nous regarde passivement de sa tour d’ivoire londonienne. Il est grand temps qu’il agisse dans le bon sens. Tout d’abord, il doit compter dans son board des membres qui représentent effectivement et sérieusement les intérêts et expriment les vrais besoins des pays en développement. Ensuite, ces membres ne doivent plus appartenir uniquement au monde professionnel (experts comptables) mais aussi ils devraient appartenir au monde académique, plus sensible aux problèmes de la croissance et du développement. Les universitaires ont des idées pour leurs pays respectifs et non pas uniquement des intérêts pécuniaires et des clients à défendre. Aussi, l’IASB doit se rapprocher géographiquement en installant dans chaque région (pays du grand Maghreb, pays du moyen orient…), voire dans chaque pays, une représentation dont l’objectif est de diffuser le produit IFRS en le rendant plus terre à terre et de faire bouger le monde de la comptabilité financière. Enfin, il doit financer le développement comptable pour que les comptables ne soient plus considérés comme de simples compteurs d’haricots.

mercredi 1 juin 2011

Convergence vers les IFRS : les pays émergents suivent le mouvement

source: Wikipédia

Impliqué dans la transition aux IFRS de pays émergents et en voie de développement, le cabinet Bellot Mullenbach & Associés et sa filiale BMA Conseil & Formation, ont réalisé une étude statistique relative à l’application des normes IFRS dans ces pays. L’étude met en évidence :
L’important nombre de pays émergents qui ont ou vont appliquer les principes IFRS et l’accélération du processus entre 2008 et 2011
Les modalités de transition choisies par nombre de ces pays, qui diffèrent de nombreux pays européens comme la France, qui avait fait le choix d’interdire les IFRS dans les comptes sociaux et de faire converger très progressivement le référentiel national vers les principes des IFRS. Cette solution prudente a rendu incontournable le débat sur un troisième référentiel (un quatrième si l’on compte le CRC 99-02 pour les comptes consolidés en France) : le référentiel « IFRS entités privées » appelé couramment « IFRS PME ».
A l’inverse, les pays émergents profitent de la refonte de leur réglementation comptable pour « aller plus loin » que certains pays développés, et adopter un plan comptable national compatible avec les IFRS. A titre d’exemple, l’Algérie a adopté un plan comptable très largement inspiré des IFRS : les grands principes et les principales notions sont identiques aux IFRS, seules les normes les plus complexes et inadaptées à l’économie locale ont été modifiées. Sur le panel de 27 pays émergents (selon les critères retenus par le FMI pour recenser ces pays), BMA Conseil & Formation a identifié 17 pays, soit 63% de l’échantillon qui, à fin 2007, interdisaient le référentiel IFRS. Ils ne seront plus que 3 (11%) en 2012 (sous réserve de décisions non encore officialisées) puisque 14 (52 %) d’entre eux ont ou vont entamer un processus de convergence. Ils vont venir étoffer la liste déjà significative des pays qui avaient déjà adopté le référentiel (10 pays à fin 2007, soit 37%) avec des modalités d’application diverses (référentiel IFRS autorisé pour toutes les sociétés, obligatoire pour les sociétés cotées uniquement…). Sur le panel de 128 pays (critères FMI), le recensement est plus difficile (manque d’information, décisions en cours mais non officialisées…). BMA a cependant recensé 69 pays (54%) autorisant déjà le référentiel IFRS. Sur ces 69 pays environ la moitié ont choisi d’autoriser ou de rendre obligatoire les IFRS pour toutes les sociétés quelles que soient leur taille. Cette diffusion des normes IFRS à travers le monde a même amené l’IASB à envisager l’élargissement du board à de nouveaux continents en ajoutant un critère géographique aux critères de sélection des membres. Le board devrait ainsi intégrer 16 membres supplémentaires dont 4 européens, 4 membres originaires du continent américain et 4 autres du continent asiatique. Les quatre derniers membres pourraient être des représentants du continent africain.

mardi 10 mai 2011

Pratique des Normes Internationales de Comptabilité du Secteur Public par des comptables qualifiés : offre du PNUD

(Mohamed Faker KLIBI, Docteur en sciences comptables - Université de Tunis)


Ce billet se réfère à l’analyse d’une annonce de recrutement de comptables qualifiés pour pourvoir 9 postes au sein du PNUD. Je vous invite à déposer vos candidatures.



Dans ce qui suit je vous fais part de mes réflexions et convictions suite à ma lecture d’une offre de travail (portant sur 9 postes) faite par le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) pour engager des comptables qualifiés et exceptionnels. Qualifiés et exceptionnels vous dites !? En se référant à l’offre, voilà mon analyse du profil.

Tout d’abord, il faut maîtriser les Normes Internationales de Comptabilité du Secteur Public (NICSP ou en anglais IPSAS : International Public Sector Accounting Standards). Ces normes sont promues par le conseil des normes comptables internationales du secteur public (pour plus d’informations, vous pouvez vous référer au lien suivant : http://fr.ifac.org/PublicSector/). Ce sont des normes moins connues que les normes comptables internationales d’information financière (IFRS), mais quand même elles commencent, ces derniers temps, à attirer l’attention des académiciens et des professionnels comptables. Leur objectif, à mon sens, est de discipliner les pays en développement en les poussant à une meilleure gouvernance publique qui rime avec transparence et équité. Voilà une nouvelle tâche que les professionnels comptables – qualifiés et exceptionnels – doivent honorer. Par ailleurs, ce qui me fait plaisir, c’est que la comptabilité publique commence à laisser, petit à petit, sa place à une comptabilité privée dont l’objectif n’est pas uniquement de faire un suivi budgétaire mais aussi de garantir un état de transparence. Cette transparence ne vise pas les investisseurs (comme c’est le cas des IFRS), mais plutôt tous les citoyens (contribuables) désirant participer à la vie publique et politique.

Ensuite, parce que cette offre fera bénéficier l’heureux candidat d’une carrière internationale, ce dernier doit maîtriser les langues anglaise et française et/ou espagnole.

Par ailleurs, les 9 postes offerts par le PNUD supposent implicitement que le candidat serait capable d’évoluer et de réussir – professionnellement – dans un cadre multiculturel. En outre, l’adhésion aux objectifs annoncés par le PNUD (aider les pays à réaliser la croissance, l’équité et la durabilité) serait un atout majeur pour réussir l’offre. Dans ce cadre, je recommande vivement les candidats intéressés par cette offre de montrer leur potentiel et capacités à adhérer auxdits objectifs lorsqu’ils rédigent leur lettre de motivation.
Enfin, et ce qui m’intéresse le plus dans cette histoire de recrutement, c’est que le PNUD encourage vivement les candidatures émanant des citoyens appartenant aux pays en développement. Il s’agit de candidats qui comprennent et assimilent le plus la réalité et les spécificités de ces pays qui aspirent à un meilleur développement et donc à un meilleur bien- être de leurs concitoyens. Cependant, les universités et les milieux professionnels comptables de nos pays seraient – ils capables d’offrir des comptables exceptionnels et qualifiés ? Je suis optimiste…je dirais oui, mais il faut savoir autogérer sa carrière qui commence à l’université. La mondialisation, à mon avis, nous offre – citoyens comptables des pays en développement- une aubaine ; un marché de travail international. Juste il faut se doter de l’ambition (yes we can), de l’ouverture (la connaissance et les chances sont universelles) et de la confiance en soi.

vendredi 25 mars 2011

Réflexion sur l’adoption des IFRS en Tunisie


Par Sawcen Chebaane (Universitaire; doctorante en comptabilité)
Depuis des décennies, L’adoption des IFRS par les pays en développement en particulier, a suscité l’intérêt non seulement des chercheurs mais aussi des praticiens et a fait émerger deux courants de pensée antinomiques. Les pays en développement sont les nations caractérisées par un indice de développement humain moyen, par la prédominance du secteur public et l’absence ou encore la mal organisation des marchés financiers du coté économique et par une profession comptable non développée pour certains pays en développement et même l’inexistence de normes nationales pour d’autres.
Le premier courant considère qu’une telle adoption est pertinente pour les pays en développement, leurs permettant d’accroitre l’investissement direct étranger, d’améliorer la situation des bourses déjà existantes, de rendre l’information financière, au sein de ces pays, plus comparable et plus transparente sans oublier l’élimination des coûts d’élaboration des normes nationales surtout que cette normalisation sera déléguée à l’IASB, organe de normalisation international privé, par voie de l’adoption de ces IFRS. De tels avantages seront réalisés grâce à la flexibilité des IFRS répondant ainsi aux besoins des pays développés et ceux en développement. Le deuxième courant, par contre, admet que l’adoption de ces normes internationales par les nations en développement comme non pertinente et non adéquate, du fait que ces normes sont très complexes, sophistiquées, fortement influencées par la culture anglo-saxonne (orientation vers les marchés de capitaux), lourdes à appliquer et nécessitant des connaissances assez approfondies en anglais par les utilisateurs de ces normes et engendrant des coûts importants que ce soit par le pays adoptant ( formation)ou par les sociétés appliquant( formation, installation du système ERP) ces normes. Ils rajoutent même que l’adoption des IFRS par ces pays n’est qu’une réponse à des pressions exercées par les institutions internationales financières (la banque mondiale et le fond monétaire international) ou/ et non financières (Big4, les multinationales).
Faisant partie des pays en développement, la Tunisie sera amenée à adopter les IFRS tôt ou tard, soit par mimétisme (l’union européenne a adopté les IFRS depuis 2005) soit pour répondre aux pressions exercées par les institutions financières internationales surtout que la Tunisie a été désignée par plusieurs experts comme étant «un bon élève de la banque mondiale ». Entre temps, la question relative à la pertinence des IFRS pour ce pays reste posée. La Tunisie est un pays arabo-musulman, dominé par la culture euro continentale due à la colonisation française étalée sur 75 ans. Sur le plan économique ; malgré les tentatives de privatisation entreprises dès les années 90, la taille des entreprises publiques demeure importante. De plus, le secteur tunisien est dominé par les micros, les petites et moyennes entreprises. (83% d’un total de 84500 entreprises sont des micros entreprises). Est-ce que ces micro-entreprises sont vraiment aptes pour supporter la lourdeur des IFRS (Full IFRS) ? Et même si on va parler de l’IFRSPME (créée par l’IASB depuis juillet 2009 pour les petites et moyennes entreprises), cette dernière sera- elle convenable pour ces entités ayant des dispositifs comptables, financiers et humains plutôt simplistes pour ne pas dire rudimentaires ? Est ce que ces entités sont prêtes pour subir les conséquences de cette nouvelle formule telle que conceptualisée par l’IASB sans qu’elle n’a été testée auparavant ?
Sur le plan financier, jusqu'à 2009 la bourse des valeurs mobilières de Tunis connait la cotation uniquement de 52 entreprises dont 23 sociétés sont des établissements financiers, situation qui peut être expliquée par la mentalité des investisseurs tunisiens dominée par l’orientation au financement auprès des banques et par les habitudes des épargnants (achat de terrains, constructions). Dans ce cas, la simple adoption des IFRS sera-elle suffisante pour améliorer la situation de la bourse de tunis ? Est-elle suffisante pour désorienter la mentalité des dirigeants et des investisseurs tunisiens ? Sinon, n’est-il pas judicieux d’activer le marché financier tunisien avant d’adopter les IFRS qui nécessitent un marché actif pour pouvoir appliquer la notion de juste valeur ?
Pour ce qui est normalisation comptable, la Tunisie a été considérée comme étant avant-gardiste suite à l’instauration du nouveau système comptable des entreprises répondant à ses besoins nationaux micro-économiques et surtout adhérant à la logique internationale tout en favorisant la méthode du coût historique, depuis 1996. Néanmoins, malgré les tentatives du normalisateur tunisien à déraper la comptabilité tunisienne, vers une anglo-américaine privilégiant l’investisseur, le niveau de divulgation de l’information financière est resté restreint à cause des pressions exercées par l‘administration fiscale ( 1ier utilisateur concret de l’information financière).D’un autre coté, bien que la profession comptable était bien réglementée en Tunisie depuis 1983, la connaissance des IFRS est un atout rétréci aux experts comptables . Pour la majorité des autres professionnels (comptables), les connaissances sont plutôt limitées au système comptable tunisien : une auto-formation en la matière et en anglais parait être primordiale avant d’entreprendre une telle adoption des IFRS. Sur un autre plan, Les recherches tunisiennes en comptabilité sont encore de l’ancre sur papier stockées dans les bibliothèques. Il sera pertinent et judicieux que le conseil national de comptabilité prenne en considération les résultats trouvés dans les recherches orientées IFRS (études de perception…) et d’impliquer les différentes parties pour la prise d’une telle décision stratégique surtout qu’on est dans une nouvelle ère supposée admettant la démocratie. Enfin, il convient de noter qu’il existe une disparité énorme quant à l’appréciation des avantages, des défis potentiels et surtout quant au choix de la stratégie à suivre pour instaurer les IFRS en Tunisie : une simple convergence du système actuel avec les IFRS, pour les préparateurs et les utilisateurs des états financiers, une adoption des IFRS limitée aux sociétés cotées (les enseignants chercheurs de comptabilité) et IFRS pour les sociétés cotées et IFRS PME pour le reste. L’absence de consensus concernant ce sujet sera à l’origine de la non-conformité aux exigences des IFRS en cas d’adoption et donc les objectifs ambitionnés ne seront pas atteints.

samedi 12 mars 2011

Des questions

Par Mohamed Faker KLIBI (Universitaire)
Après la chute du mur de Berlin et le démantèlement de l’Union Soviétique, le mot d’ordre devient : mondialisation… et le mot clé qu’on peut lui associer : one size fits all !!. Dans ce cadre, tous les pays de ce monde on perdu leur intimité économique, politique, sociale et même culturelle. Dans ce nouvel ordre mondial, la normalisation comptable n’a pas été épargnée par cette vague de mondialisation et depuis, l’International Accounting Standards Board (IASB) a trouvé une légitimité qu’il cherchait depuis 1973 ; date de sa création. Les IFRS sont des normes sophistiquées et qui ont pour objectif d’élever la qualité du reporting financier des entreprises qui les appliquent. En termes moins savants, avec les IFRS, les comptables ne seront plus considérés comme de simples compteurs d’haricots !!. Cependant, ces normes sont – elles utiles pour les Pays En Développement ? Les professionnels comptables (les experts comptables, les comptables agrées et les comptables salariés) et les enseignants de la comptabilité sont – ils dotés d’une vraie culture d’apprentissage à vie (lifelong learning) que suppose la maîtrise des IFRS ? Nos universités sont – elles prêtes pour assurer des cours qui respectent l’esprit des normes internationales ? Nos entreprises sont – elles bien gouvernées pour appliquer d’une manière neutre les IFRS ? Et si ces normes ne sont pas appliquées d’une manière neutre avons – nous une forte société civile pour dénoncer voire sanctionner toute pratique ayant pour objectif de nuire à la transparence financière et économique ? Enfin, l’adoption des IFRS ferait – elle des pays en développement…des pays développés ????... ?
Ce blog a pour objectif de générer des réflexions qui prennent en compte un ou plusieurs mots clés suivants : IFRS – Pays en développement – Pertinence d’adoption – état de transparence – développement économique, politique, social…etc. Si cette idée vous intéresse, merci de me faire parvenir vos réflexions à l’adresse suivante : faker.klibi@planet.tn

dimanche 6 mars 2011

Les normes IFRS dans les pays MENA : parle-t-on d’un produit de marque ?


Anas KOSSENTINI (Universitaire ; Doctorant en Sciences Comptables)

Longtemps débattue dans les écrits académiques et professionnels, la question de la pertinence des normes comptables internationales –IFRS–, pour le cas des pays en développement, a fait l’objet de vives contestations constamment renouvelées. L’organisme international de normalisation comptable (IASB), jouit ces dernières années d’une reconnaissance mondiale, non seulement dans les pays développés (pays de la zone Euro, Canada, Australie), mais aussi dans les pays en développement, entre autre les pays MENA (Les pays du Moyen Orient et du Nord Afrique). Confier la normalisation comptable à un organisme professionnel privé et distant dans ces pays laisse surgir à la surface d’un débat, de plus en plus routinier, une vague de questions, et même parfois, « d’énigmes » où les réponses semblent être divergentes et antinomiques. Est-ce-que le recours à de telles normes, originairement conçues pour satisfaire le besoin des pays développés, pourrait jouer le rôle d’un substitut merveilleux des normes comptables locales, parfois, inexistantes ? S’agit-il d’un réel besoin de transparence de l’information financière ou d’un simple mimétisme aveugle, privé de toute sorte de réflexion ou d’esprit critique ? Parle-t-on d’un produit de marque permettant à son acquéreur de conquérir un certain « prestige » commercial, ou du moins une légitimité ?
Même si, parfois, l’adoption des IFRS n’est pas totale, aujourd’hui, aucun pays MENA n’ignore ou rejette les IFRS. Si, d’un coté, on s’inspire de ces normes internationales pour concevoir les normes locales (par exemple la Tunisie et l’Iran), on peut, d’un autre coté, les rendre permises (par exemple le Maroc et l’Israël) ou même obligatoires pour quelques types de sociétés (par exemple l’Arabie Saoudite). Nécessitant l’adoption totale des IFRS pour pouvoir qualifier un pays d’adoptant sérieux, plusieurs sont ceux qui pensent que les autres formes d’adoption « partielle » ne sont qu’une façade trompeuse, qui se dissimule derrière la fameuse expression « adoption des IFRS ». Le recours à ces formes d’adoption déplacées et qui défavorisent les normes comptables locales, souvent satisfaisantes et qui sont conçues pour répondre aux particularités du pays, est accompagné par un manque de familiarisation tant sur le plan éducatif que professionnel.
Considérées aux yeux du professeur Belkaoui comme « transfert/adoption d’une technologie », les normes IFRS ressemblent ces jours-ci à « facebook » (le portail de communication le plus populaire dans le monde). Même si ce dernier s’affronte à des produits de substitutions (essentiellement Twitter et FlickR), offrant parfois des caractéristiques plus sophistiquées, aucun des utilisateurs des réseaux sociaux ne peut se passer à coté d’un compte « facebook ».
En effet, si on prend l’exemple du Maroc qui a rendu l’utilisation des IFRS permise pour les sociétés cotées à partir de 2004, on remarque que quelques sociétés ont opté pour le référentiel international, alors que les autres continuaient à utiliser les normes marocaines qui se rapprochent d’un modèle comptable franco-germanique. Face à deux référentiels complètement divergents, le résultat ne peut être qu’une paralysie au sein du milieu des affaires. Certes, les préoccupations de la légitimité internationale sont importantes, mais, dans un monde caractérisé par le décloisonnement des marchés financiers et économiques, la valeur ajoutée que pourrait apporter le titre « pays adoptant des IFRS », semblerait prendre le dessus. Attirer les investisseurs étrangers par une pseudo-adoption, a pour objectif de faire apparaitre avoir un meilleur reporting financier basé sur un produit de marque (IFRS), légitime et internationalement reconnu.
Bien que l’analyse ci-haut avancée ait parti d’une logique commerciale, expliquer un phénomène comme celui de l’adoption des IFRS dans les pays en développement reste toujours ardu et nécessite de gros efforts de la part des chercheurs en la matière. Face à cet énorme défi, et en ayant confiance en la qualité des chercheurs tunisiens et arabes, je suis plein de certitudes que les travaux et les écrits dans ce sujet vont se multiplier dans une ère de démocratie globale qui règne le monde arabe. Une ère, où les plumes se sont libérées.

jeudi 24 février 2011

La démocratie et la démocratisation de l’information à travers les IFRS permettent-elles d’atteindre un meilleur stade de développement ?


Par Fatma BEN SLAMA (Universitaire; Docteur ès sciences de gestion)

Pour parler de développement, il faut tout d’abord définir le sous développement. Je trouve que la meilleure façon de le faire consiste à se référer aux critères des organisations internationales qui financent le développement telles que l'Organisation des Nations Unies et la Banque Mondiale. En effet, ces institutions se basent sur plusieurs critères pour accorder à un pays le qualificatif de PED. Ces critères sont: la pauvreté, la croissance rapide de la population, le taux de chômage élevé, l’inégalité dans la distribution des revenus et des richesses, le déséquilibre dans le développement régional, des dettes extérieures importantes, un faible niveau technologique et un besoin pressant pour améliorer l'éducation (Wallace, 1990). A côté de ces critères macro économiques et sociaux, il est possible de rajouter un critère micro économique relatif à la faiblesse des modes de gouvernance des entreprises.
Si nous observons la réalité de la Tunisie, nous trouvons que la majorité de ces critères est malheureusement vérifiée. On ne peut nier qu’en Tunisie, la révolution s’est déclenchée principalement à cause des taux de chômage élevés chez les diplômés et les non diplômés à côté de disparités régionales importantes entre Kasserine, Sidi Bouzid par exemple avec la capitale et les autres villes côtières et des niveaux de pauvreté choquants. Les tunisiens se sont aussi révoltés contre l’accaparation des richesses du pays par une élite économique non seulement proche du pouvoir mais qui représentait le pouvoir. Malgré tous les progrès entrepris auparavant en matière d’éducation, notre système souffre, on ne sait vraiment pour quelles vraies raisons, internes dues à une incompétence ou à une préméditation ou externes et pas vraiment innocentes qui nous ont encore et encore enfoncées dans le sous-développement. De tous ces critères, je pense qu’on n’a pu que contrôler la croissance rapide de la population dont le mérite revient évidemment à l’époque de Bourguiba.
A tous les niveaux du pays, les problèmes de mauvaise gouvernance et de corruption, sont flagrants, de l’entreprise aux institutions gouvernementales, rien ne semble être gouverné de la meilleure des façons. L’héritage est malheureusement de grandes dettes extérieures qui compromettent le futur du pays.
En voilà le fruit des dictatures, un enfoncement de plus en plus grand dans le sous-développement, tels que défini par les institutions internationales, et une perte d’au moins 2 points de croissance économique annuelle. Pourtant, nombre de gouvernements étrangers et d’institutions avaient applaudi les avancées de la Tunisie en matière économique. On avait l’impression qu’il ne manquait presque rien pour atteindre la transparence financière à part une adoption des IFRS prévue pour 2014. Un lot de normes sophistiquées élaborées pour traduire la réalité des transactions des pays développés. Une pareille décision avait-elle vraiment un sens dans un pays qui se noyait dans l’opacité et dont presque toutes les transactions étaient mystérieuses ? Là où toute voix qui s’élevait pour demander des comptes, juste de l’information était indésirable ?
Un lot de normes, constitue, à mon sens, un lot d’outils nécessaire mais pas suffisant pour atteindre une démocratisation de l’information économique et financière. La démocratisation de l’information financière ne peut pas être offerte, elle suppose un public averti qui la demande et qui est doté d’outils pour l’exiger. Par conséquent, le passage à la démocratie, qui est synonyme de droit à l’information, de droit à l’opposition, de contestation, d’implication dans les choix stratégiques du pays, de reddition des comptes et de transparence permettra au tunisien de bénéficier d’une vraie voie vers le développement économique… Pour le développement de la vie culturelle, les efforts à faire sont énormes mais je suis vraiment optimiste et je fais confiance au génie des intellectuels tunisiens!

dimanche 20 février 2011

La Transparence Financière : une notion qui rime bien avec la démocratie !


La transparence financière a souvent été un souci majeur pour les économistes, les financiers et les comptables. Cette notion rime bien avec les exigences des Sociétés les plus développées dotées d’institutions gouvernementales et non gouvernementales et de Société civile capables d’instaurer un minimum de transparence dans les transactions. Dans les pays les moins développés, les gouvernements ont souvent entrepris des réformes, répondant aux exigences d’institutions financières internationales, tels que le FMI et la Banque mondiale pour montrer des progrès, supposés, en matière de transparence. Parmi les principales réformes, nous citons l’adoption des IFRS, en tant que normes d’information financière sophistiquées qui garantissent, théoriquement, sur le plan quantitatif, un plus grand flux d’information et sur le plan qualitatif, une meilleure pertinence, fiabilité, comparabilité et intelligibilité.
Les plus sceptiques ont souvent considéré que les IFRS ne peuvent pas être dissociées par rapport au contexte de leur adoption en ce sens que si elles sont adoptées dans un environnement de bonne gouvernance, elles peuvent être efficaces. Par contre, leur adoption dans des pays, en développement, dont les institutions sont fragiles par rapport au pouvoir suprême d’une élite économique proche du pouvoir, ne peut relever que de la pure publicité qui renforce l’image de marque du pays face à un besoin en IDE. Ces pays, manquaient de motivation en matière de transparence et se noyaient de plus en plus dans une opacité souhaitée qui favorisait les inégalités sociales et l’impunité des dépassements.
Aujourd’hui, les pays en voie de développement depuis des décennies, sont enfin, aussi en voie de démocratie qui induit forcément une voie vers la transparence financière. La révolution tunisienne et les révolutions qui s’en suivent ont été alimentées par une soif d’égalité sociale, de partage équitable des richesses. Des richesses, qu’il faut compter, en rendre compte, contrôler pour pouvoir les allouer. Le comptable peut, à mon sens, enfin, pouvoir jouer pleinement son rôle capital au service de la transparence et de la démocratie.

mardi 18 janvier 2011

Interview intégrale que j’ai accordée à Eco-Journal



Eco-journal : Comment jugez-vous les normes comptables actuellement utilisées en Tunisie?

Mohamed Faker KLIBI : L’application des normes comptables nationales actuellement en vigueur date de 1997. Donc, après 14 ans d’application, je crois que les professionnels comptables (experts comptables, comptables agrées, comptables salariés) ont bien saisi l’âme desdites normes et fournissent,  par conséquent, une bonne expertise aux entreprises tunisiennes (et les entreprises étrangères aussi). Cette situation a été profitable pour les utilisateurs des états financiers (qu’on peut aussi qualifier d’acteurs économiques)  ; surtout les  investisseurs, les banquiers, les analystes, les  journalistes et… le public d’une manière générale (peu initié aux chiffres comptables) qui accède de plus en plus à une vulgarisation des informations financières et comptables (souvent techniques) assurée par la presse économique et financière (revues spécialisées, sites web, radios, blogs…etc.). En bref, jusqu’à maintenant, je pense que les normes comptables tunisiennes décrivent adéquatement  l’activité des entreprises  et adhèrent aux besoins actuels des utilisateurs des états financiers. Mais, en économie il faut toujours savoir  anticiper les besoins futurs des différents acteurs économiques, surtout ceux qui observent l’entreprise de l’extérieur et qui s’intéressent éventuellement à l’évaluation de ses activités pour une raison ou pour une autre. En effet, dans un environnement mondialisé et dont l’évolution est très rapide et contingente, on ne s’intéresse plus uniquement à la performance et à la situation financière intrinsèques de l’entreprise ou bien  à la manière avec laquelle cette dernière est gérée. Il faut plutôt que l’information publiée renseigne sur les impacts positifs et négatifs du marché (commercial, financier, bancaire, immobilier…etc.) sur la performance, la situation financière et la richesse des propriétaires de l’entreprise. Sur le plan normatif, il faut passer d’une logique comptable basée sur le coût historique à une logique comptable qui plaide en faveur de la juste valeur. C’est pour cette raison que la Tunisie se prépare actuellement à passer à une autre réforme comptable consistant à adopter le référentiel comptable international qui met en avant un principe comptable (parfois contesté, parfois désiré) nommé juste valeur.              
EJ : Les entreprises tunisiennes et les experts comptables sont-ils prêts pour le passage vers les normes IFRS? Pourquoi?

MFK : Actuellement aucune personne (morale ou physique) n’est prête pour assurer ce passage. C’est pour cette raison que la décision d’adoption des normes IFRS est dotée d’une dimension stratégique : l’adoption des normes internationales n’est pas pour demain, il faut donc se préparer encore. Mais il faut dire que cette préparation est très difficile. Pour maîtriser les normes IFRS, les grands cabinets d’expertise comptable dotés d’importantes ressources financières et d’un réseau international très puissant ont su former leurs experts et collaborateurs – en Tunisie et à l’étranger – auprès d’un nombre de formateurs d’une réputation internationale. Actuellement, ces cabinets (qui ont déjà reçu leur formation) proposent de former les cadres d’entreprises tunisiennes en contre partie, ils demandent une rémunération dépassant, parfois, le budget de formation de la majorité des entreprises tunisiennes surtout les PME. Les autres  experts comptables et les universitaires (spécialistes en comptabilité)  comptent plutôt sur leurs propres moyens pour se former et former des professionnels comptables ou des étudiants inscrits en licences ou en  mastère comptabilité. Dans ce cadre, quoique l’effort consenti  par ces derniers intervenants soit louable pour qu’ils se forment eux même, je pense que  l’Etat est appelé à intervenir (surtout pour le cas des universitaires) pour les aider à mieux maîtriser les IFRS et à assurer, par conséquent, un enseignement d’une meilleure qualité pour les futurs comptables et experts comptables.   

EJ : Est ce qu'il y a une démarche bien déterminée à suivre pour l'adoption de ces normes?

MFK : Pour réussir l’adoption et surtout l’application des normes IFRS,  il est impératif d’impliquer tous ceux qui s’intéressent à la chose comptable et à la transparence du milieu des affaires. Dans ce cadre, une commission consultative qui représente l’Etat, les professionnels comptables, les universitaires, les chefs d’entreprises…etc., pourrait fédérer l’effort de tous ces acteurs et à laquelle sera confiée la charge de la préparation d’un plan d’action rigoureux qui retrace l’ensemble des étapes menant à l’adoption des normes internationales. A mon avis, le point central qui doit être discuté lors de la préparation de ce plan est la formation des comptables. C’est eux qui, par leur pratique adéquate et raisonnée des IFRS, peuvent éclairer les différents acteurs économiques sur la véritable santé financière des entreprises. Ce plan doit ressortir un référentiel de compétences (génériques et techniques) requises pour bien appliquer les normes comptables internationales. Ce référentiel doit être pris en considération par les formateurs professionnels et par les universitaires. 

EJ : Quels sont les différents apports de ces normes?

MFK : Les apports de ces normes sont nombreux. On va se contenter d’évoquer et d’analyser les apports les plus pertinents : 
1.      
 L’apport des normes IFRS , serait tout d’abord bénéfique sur un niveau macro – économique parce qu’une pareille démarche est susceptible de renforcer l’adhésion de la Tunisie par rapport à une communauté internationale (notamment les pays développés)  prête à nous faire bénéficier d’un investissement direct étranger et de ses avancées technologiques en la matière. Ajoutée à cela une meilleure lisibilité des comptes de nos entreprises par les utilisateurs étrangers.
2.        
Avec l’application des normes IFRS on peut assister à une sorte de démocratisation de la relation entreprise – utilisateurs des informations financières et plus particulièrement le public. En effet, les normes internationales poussent les dirigeants des entreprises à publier le maximum d’informations renseignant sur les faits économiques et financiers ayant impacté ou susceptibles d’impacter  l’activité présente et future de l’entreprise. Dans tout ça, je pense à un utilisateur bien particulier : le public. En effet, les bailleurs de fonds, les analystes et les journalistes ont leurs propres moyens (privés) pour accéder à une information de qualité. Le grand public, on ne peut l’intéresser que par une information publique ; donc celle mesurée sur la base des normes IFRS. Dans ce cadre, on compte beaucoup sur les journalistes spécialisés  (à mon avis c’est une mission nationale) pour vulgariser les informations comptables et financières pour que le grand public, constitué de citoyens appartenant à la classe moyenne (plus de 80% de la population tunisienne), contribuent à l’essor de notre économie (en investissant dans la bourse par exemple ou en prenant  plus d’initiative en matière de constitution des sociétés).     
3.        
A mon avis, les normes IFRS respectent mieux l’intelligence et le travail du professionnel comptable. En effet, ces normes se basent essentiellement sur des principes et ne fournissent pas des règles comptables précises à suivre à la lettre par le professionnel comptable. Ce dernier semble avoir une obligation de résultat : publier des informations à caractère financier qui aident à la prise d’une décision économique. Donc, en se basant sur ces normes, le comptable devrait s’imprégner de la culture comptable qu’inspirent les  IFRS,  compter sur son jugement professionnel pour interpréter lesdites normes dans un sens qui aide à rendre l’entreprise transparente et à être, par conséquent, mieux suivie par les investisseurs, les analystes, les journalistes…etc.
 

Offrir plus de possibilités à nos étudiants qui détiennent un diplôme de comptabilité à accéder au marché de travail d’autres pays. En effet, avec l’ouverture du marché de travail à l’international, nos étudiants peuvent valoriser leur savoir et savoir faire en offrant leurs  connaissances et aptitudes à d’autres entreprises qui se trouvent sous d’autres cieux et qui appliquent déjà les normes IFRS. C’est pour cette raison que l’université tunisienne a commencé, avant même que le normalisateur tunisien les adopte, à enseigner les normes internationales.       

L’évolution du marché boursier tunisien passe par une communication financière volontaire, régulière et efficace

C’est grâce à la communication financière qu’on peut parler d’un climat de confiance entre entreprises faisant appel public à l’épargne et la communauté financière : principalement les actionnaires, les investisseurs financiers potentiels, les analystes financiers, la presse économique et financière, les agences de notation, les syndicats, les étudiants – chercheurs et le - large public- d’une manière générale constitué par des agents économiques à capacité de financement mais peu familiarisés avec le monde de la bourse.
La communication financière peut être définie comme l’action de communiquer au public toute information qualitative ou chiffrée, souvent mesurée en se référant à une base monétaire, et renseignant sur l’activité économique (passée, présente et future) de l’entreprise. Les informations financières peuvent être issues d’un système d’information réglementé (comptabilité financière, donc nous parlons de données objectives) ou bien volontaire (dans ce cas, nous parlons de données subjectives). C'est dans ce sens que plusieurs études ont montré que communiquer financièrement aide les entreprises cotées à trouver facilement un financement (augmentation de capital ou émission d’emprunt obligataire), à promouvoir leurs titres, à diversifier leurs actionnaires et d’une manière générale à améliorer leur image institutionnelle.
Plusieurs supports peuvent aider l’entreprise cotée en bourse à s’exprimer financièrement et d’une manière efficace auprès de son public, nous citons à titre indicatif :
La presse économique et financière (télévisions, radios, revues spécialisées, journaux, sites Internet…etc.);
Le site Web de l’entreprise concernée (dans une rubrique spécifique appelée : actionnaires, investisseurs, finance ou données financières…etc.);
Les sites Internet des intermédiaires en bourse; et
Tout autre moyen permettant de transmettre fidèlement les données financières.
La politique de la communication financière au sein des entreprises cotées est normalement confiée à un spécialiste en la matière appelé informateur financier ou d’une manière plus fantaisiste « investor relation ».
La problématique de la communication financière devient, à notre sens, d'un intérêt majeur pour les entreprises tunisiennes, notamment à la veille de l’ouverture de notre économie sur le marché européen présentant des potentialités de compétitivité considérables. Mais, aujourd'hui, en Tunisie, peut-on parler d’entreprises qui sachent efficacement et régulièrement s’exprimer financièrement auprès du public qui s’intéresse de loin ou de près à leur activité ?
A notre avis, pour la majorité des entreprises tunisiennes cotées en bourse, le moyen le plus utilisé pour communiquer financièrement est la publication des états financiers annuels, semestriels et parfois trimestriels (surtout pour les établissements bancaires) dans des journaux locaux. Autrement dit, les entreprises se contentent de faire le strict minimum exigé par la loi comptable (loi 96 – 112 relative au système comptable des entreprises) et boursière (entre autres la loi 94-117 portant réorganisation du marché financier et la loi 2005-96 relative au renforcement de la sécurité des relations financières). Cependant, la compréhension des données comptables que nous trouvons dans les états financiers n’est pas accessible au large public qui a besoin d’une culture financière et boursière.
D’un autre côté, les entreprises tunisiennes, qui font appel public à l’épargne, essayent de transmettre des informations financières à travers des communiqués de presse publiés dans des journaux ou dans les sites Web de la bourse des valeurs mobilières de Tunis ou de quelques intermédiaires en bourse. Ces communiqués sont souvent repris par des sites spécialisés dans l’analyse financière ou bien par la presse économique et financière. Cependant, le contenu de ces communiqués est souvent général et peu analytique.
Les entreprises tunisiennes cotées s’expriment financièrement aussi lors des assemblées générales (ordinaires ou extraordinaires), à huis clos, c'est-à-dire devant leurs actionnaires (souvent institutionnels ou appartenant à une ou deux familles). Nous notons par ailleurs, que la communication financière est souvent faite d’une manière ponctuelle en ce sens que le grand public, souvent habitué à connaître les sociétés cotées à travers leur communication commerciale (spots publicitaires (à la télévision ou à la radio), affiches…etc.), peut accéder à une communication financière d’une entreprise immédiatement avant l’augmentation de son capital.
Il faut rappeler dans ce cadre, que l’une des caractéristiques de la communication financière est la régularité. A notre avis, ce qui reflèterait la volonté des entreprises tunisiennes en matière de communication financière régulière et volontaire, serait le contenu de leur site Web. C'est ce qui nous a poussé à investiguer le fait que les entreprises tunisiennes aient ou non prévu une rubrique (sous forme de lien) pour les actionnaires et les investisseurs financiers potentiels. Cette rubrique pouvant figurer sous l'un des noms suivants: actionnaires, investisseurs, finances, corporate, informations financières…etc. lire la suite

mardi 11 janvier 2011

une interview que j'ai accordée à EL WATAN - Algérie

«Actuellement, le SCF dépasse les besoins de l'entreprise algérienne»
Mohamed Faker Klibi. Docteur en sciences comptables
Safia Berkouk
El Watan : 10 - 01 - 2011
Mohamed Faker Klibi est docteur tunisien ès sciences comptables et enseignant à l'ESSECT de Tunis. Il s'intéresse depuis longtemps à la possibilité d'adoption des normes internationales d'informations financières (IFRS) par les pays en développement en général avec pour objectif de définir ses perspectives, ses opportunités et ses enjeux. Le chercheur défend l'idée selon laquelle l'adoption des normes IFRS pour les pays en développement revêt d'autres intérêts que le simple souci de transparence et circulation de l'information comptable et financière des entreprises. L'enjeu serait d'envergure internationale et c'est ce qu'il nous explique dans cet entretien qu'il nous accorde.
-Vous développez l'idée que l'enjeu de la mise en œuvre de normes internationales en matière de comptabilité pour les pays en développement n'est pas seulement interne et en relation avec l'intérêt immédiat des entreprises. Pourquoi ?

Le système comptable international est conçu pour...lire la suite sur ce lien